Détails sur l'Assemblée des Oulémas pour proclamer le DJIHAD de 1871
La réunion s’est tenue chez Cheikh Aheddad dans sa zaouia de Seddouk (vallée de la Soummam), pour mettre au point " une fetoua " pour valider le djihad et choisir le jour du début des opérations.
Au cours des débats, cheikh Mohand Oulhocine est intervenu, en improvisant un poème à l’intention de ses pairs, par lequel il fait ressortir que les conditions d’un succès ne sont pas réunies. Pour lui, c’est une aventure qui aboutira à un échec catastrophique, et qu’il est donc préférable d’arrêter le processus avant qu’il ne soit trop tard.
Cheikh Aheddad surpris et irrité par cette interprétation poétique a répliqué " Que Dieu te prive de descendance masculine " : " Aki negh Rebbi sen gger ", la mise en garde de l’un et la malédiction lancée par l’autre se sont réalisées.
Il n’y a pas eu d’unanimité pour le djihad, au sein d’un même arch. On trouve un village qui participe à coté d’un autre qui reste passif. Cheikh Mohand Oulhocine, n’a pas participé, sa clairvoyance des choses ne lui a pas fait défaut et ne l’a pas démentie. J’ai entendu son poème historique chez des vieux de mon village, c’est dommage, je ne l’ai pas retenu.
Lorsqu’on réfléchit, à cette assemblée des Oulémas influents, pour décider de la guerre de libération : ils ont dû se retrouver en présence de deux thèses :
Primo : la situation de la France envahie par l’Allemagne, l’armée française défaite, prisonnière avec l’empereur Napoléon III en tête, Paris est assiégée et la population endure une famine excessive, le gouvernement désemparé, ne pourrait supporter un soulèvement populaire en Algérie. C’est la capitulation humiliante, perte de l’Alsace Lorraine, amende de trois milliards de francs - or, solution préférable à l’abandon de l’Algérie, pour les nôtres, c’est une occasion qui ne se représentera plus jamais pour la libération du pays, il fallait donc passer à l’action.
Secundo : la France parterre de tout son corps, agonisante, avec le couteau Allemand sur la gorge est-il moralement, humainement convenable de lui porter le coup de grâce dans une pareille situation ? les sentiments, les scrupules se sont certainement mêlés et ont empêchés l’unanimité de se concrétiser autour de la proclamation du djihad.
Le gouvernement français ayant arrêté son choix, accepte toutes les conditions Allemandes et dépêche immédiatement des renforts en Algérie pour reprendre la situation en mains, une dure répression s’abat sur les insurgés, exils, déportations vers Cayenne et la Nouvelle-Calédonie, confiscations et séquestres des terres au profit de la colonisation, otages à libérer contre rançon. Cheikh Aheddad est incarcéré à la prison militaire de Constantine. Il passe en jugement et écope de 5 ans de prison. Au président qui prononce cette sentence, il réplique " votre prison ne peut me retenir, dans 5 jours seulement je m’en irai d’içi ", au cinquième jour, cheikh rendra le dernier soupir et fut enterré à la prison militaire de Constantine. Cheikh Aheddad, ne mérite t-il pas d’être réinhumé en dehors de cette prison ?.
La version française sur les événements qui se sont déroulés dans notre région en 1871, n’a fait qu’effleurer le sujet pour ne pas l’ignorer complètement. Mon vœu, c’est le rétablissement de la vérité historique par les algériens eux-mêmes en puisant dans la tradition orale qui est la nôtre.
D’autre part, cheikh Mohand Ouali Ousahnoune est le premier adjoint de cheikh Aheddad, déporté et évadé, mort et enterré à la Mecque, mérite également une réhabilitation.
Cheikh Ahmed Oussalah ou Mohamed Oussalah originaire du village Sidi-Yahia Ivehriene (Azeffoune) qui a participé également au djihad et qui a été jusqu'à Cayenne remettre en main propre, à cheikh Mohand Ouali , 4000 francs de l’époque, prix de son évasion par bateau anglais, mérite également la réhabilitation pour cet acte courageux et son intégrité devant la tentative de l’administration pour le récupérer à son profit.
Cheikh Mohand Ouali-Ousahnoune
Il regroupe au sein de sa confrérie un nombre considérable de khouanes, sa zaouia se trouvait au village issahnounene sur les hauteurs de Tizi-Rached pas loin de Larbaa-Nath Irathene. Après l’échec de l’insurrection, la répression fut exemplaire, cheikh Mohand Ouali fut exilé à Cayenne, il avait auparavant pris la précaution de désigner son remplaçant à la tête de la confrérie en la personne du vénérable cheikh Mohand Said Oussahnoune dont la zaouia très connue, se trouve à " taghorast " près de Sidi-Aich. Elle est bien fréquentée jusqu'à présent.
Dés son arrivée à Cayenne, Cheikh Mohand Ouali, s’est mis en tête de chercher le moyen pour se libérer, il rencontra un navigateur anglais qui lui promit de l’aider en le menant dans son bateau jusqu'à Djeddah, contre remise d’une somme de 4000 francs, cheikh Mohand Ouali alerta les khouanes de ce projet. La somme était énorme à l’époque mais, la quête organisée rapidement fut un grand succès. Il ne restait, qui pourrait faire le voyage lointain et risqué pour remettre la somme en main propre.
Cheikh Mohand Oussalah s’est porté volontaire et a fait le voyage pour remettre la somme à Cheikh Mohand Ouali qui ne tarda pas un jour à se retrouver à Djeddah (Arabie Saoudite), libre, il envoya une lettre de remerciement et de félicitations aux khouanes et leur demanda de dire à son épouse de le rejoindre accompagnée par Hadj-Said Ihamouchene du village AIT-SALAH, l’un de ses meilleurs fidèles. Ce dernier a accompli sa mission avec joie et c’est à la Mecque que Cheikh Mohand Ouali et son épouse ont terminé leur vie et c’est là qu’ils furent enterrés.
L’évasion spectaculaire de cheikh Mohand OualiI a donné lieu à une enquête de l’administration coloniale, qui a aboutit à l’interpellation de Cheikh Mohand Oussalah, celui-ci a revendiqué sa responsabilité , devant son courage, l’administration s’est efforcée de le récupérer, mais en vain, il est mort et enterré en son village natal de Sidi-Yahia près d’Azeffoune.
Archives de Mr ACHIT LARBI
Interview de Achit Larbi sur les événements de 1871 :
https://www.youtube.com/watch?v=9ZyfkU99mKM